Par Ddarya Fall, World BEYOND War, Août 14, 2024
Une œuvre de fiction.
Enfant, j’adorais les dystopies. J’étais fasciné par la façon dont les choses changeaient soudainement de manière inattendue. J'ai adoré observer l'héroïsme des personnages. Une résilience restée intacte face à la destruction, à la déstructuration et à la désarticulation. J’aimais avant tout m’inspirer de leur espoir. Un espoir qui, malgré les vagues de destruction, résiste, s'affirme et ne lâche rien.
Les dystopies étaient la preuve que peu importe l’enfer ou les difficultés qui nous entouraient, il y avait en nous la force de se relever.
J'avais envie de m'abreuver de la force des héros, de leur courage et de leur entêtement. L'obscurité dans laquelle ils baignaient ne les empêchait pas d'espérer la lumière. Je m’en suis inspiré, me persuadant que peu importe ce qui se passait à l’extérieur, j’aurais en moi une plus grande force pour résister.
Ma vie était devenue une dystopie et je n’avais ni espoir ni résilience. Je n'étais pas fort et j'avais l'impression d'être en train de mourir. Chaque jour qui passait était un test. Chaque jour était un défi à la mort. Chaque jour qui passait, nous nous en rapprochions.
J'ai du mal à comprendre comment on en est arrivé là. Mon Soudan, ma Nubie, l’un des royaumes les plus prospères et les plus civilisés du passé, est devenu chaos et destruction. Tout semble irréel. Notre vie antérieure, qui semble si lointaine et pourtant si présente à la fois, et notre vie présente, qui n'est qu'une sombre façade de nos pires cauchemars.
©Muhammad Mustafa Abu Al-Hassan. Un artiste de 23 ans vivant au Soudan.
Ma Nubie me manque, mes pyramides si belles et chargées d'histoire. La chaleur et la joie de mon peuple me manquent. Le thé servi à toute heure de la journée me manque. Les rires des enfants, la force de nos mères, la chaleur de notre accueil qui fait de nous un peuple si hospitalier me manquent.
Ma Nubie me manque. Soudan, mon Soudan, comme il est agréable de le murmurer dans ton cœur.
«Thawra!»
Je me souviens que ce mot était crié à pleins poumons dans les rues. J’étais dehors, je le criais à pleine voix avec mes pairs. dégel, Révolution en arabe, était plus qu'un mot. C'était un hymne. Une force. Un hymne contenant nos espoirs de révolution. Nous, les femmes, avions mené cette Révolution. Nous étions prêts à mourir. Nous voulions une nouvelle vie, un nouveau Soudan que la Révolution nous aiderait à construire. Prêts à sacrifier nos vies, notre soif de révolution était inextinguible.
dégel était une bouffée d'air frais. Une guerre déclarée aux oppresseurs. Une reconquête de notre pays. Un nouveau Soudan construit par des jeunes audacieux et patriotes.
Notre mobilisation a porté ses fruits. Un nouveau régime a été installé, bien que transitoire, mais qui aurait pensé que l'horreur viendrait d'eux ? Qui aurait pensé que des notes plus sombres suivraient.
©Muhammad Mustafa Abu Al-Hassan. Un artiste de 23 ans vivant au Soudan.
15 avril 2023. Cette date semble écrite à l’encre chaude sur ma peau. Le jour où tout a basculé. Le jour où tout s'est effondré.
Je n'aurais jamais cru que les choses pourraient changer si vite. Je me souviens des armes. Les cris dehors. Le désespoir dans l'air. Je me souviens avoir verrouillé à double tour la porte de ma maison. Je me souviens de mes mouvements erratiques, cherchant des couteaux, rassemblant n'importe quelle arme de protection.
J'avais l'impression que mon monde avait été bouleversé. Les planètes ne sont plus alignées dans la même direction. Déréalisation. Le mot m'est venu à l'esprit. Cela correspondait à mon mal-être. C'était irréel. Cette réalité n’était pas la mienne. Mon Soudan n’aurait pas pu sombrer aussi bas. Ma vie ne pouvait pas changer autant.
Le bruit des reportages télévisés sur la guerre en cours devenait insupportable. On pense souvent que certains malheurs n’arrivent qu’à d’autres. Je suivais depuis longtemps les reportages de guerre. Mon propre pays a survécu aux guerres. Mais notre révolution ! dégel, avons-nous crié à pleine voix. Un nouveau Soudan était à notre portée ! Mais pas ce gâchis actuel !
Le temps n’a pas arrangé les choses. Ils sont allés de mal en pis. La couverture médiatique a progressivement diminué. La solidarité a emboîté le pas. Nous n'étions plus que des chiffres. L’horreur était à la hausse. Les acteurs étatiques se multipliaient et nous, les civils qui n'avions rien demandé, voyions nos vies se faire progressivement prendre. C'était irréel.
©Muhammad Mustafa Abu Al-Hassan. Un artiste de 23 ans vivant au Soudan.
L'espoir n'était qu'un mot, mais comme il est tenace même dans l'obscurité totale. J'ai essayé de me battre avec ce que j'avais. J'ai ouvert une page partageant mon quotidien de jeune femme vivant dans un pays où une guerre était en cours. Une guerre que nous n'avons pas demandée. Une guerre qui limite nos espoirs.
Quand nous montrons des images de guerre, nous ne montrons que des images de destruction. La souffrance de ceux qui l’ont vécue est ignorée. Ceux qui perdent tout. Ceux qui finissent par se perdre. Ceux qui ne se permettaient plus de rêver, qui vivaient dans l’attente de la mort.
C'était dystopique.
L’odeur de la mort flottait dans l’air. Au début, c’étaient des gens dont nous ignorions même l’existence. De plus en plus de personnes dans notre entourage succombent. Amis. Collègues. Les proches. La guerre est une attaque contre la vie en général.
Notre situation empirait. Des viols étaient signalés. Hôpitaux détruits. Le nombre de réfugiés augmentait. Les rapports internationaux indiquent que nous avons le plus grand nombre de personnes déplacées. J'aimerais que les gens sachent ce que cela signifie. Des milliers de personnes abandonnent leurs maisons, leurs foyers, dans l'espoir d'une sécurité qu'ils ne sont pas sûrs d'obtenir. Des corps sans vie alignés. Des massacres quotidiens.
Nous ne méritons pas ça. Ce n'était pas bien.
©Muhammad Mustafa Abu Al-Hassan. Un artiste de 23 ans vivant au Soudan.
Je n'étais pas aussi forte qu'une héroïne d'un film dystopique. Je me sentais faible, vulnérable. J'avais constamment peur d'être violée, tuée, détruite. Mon beau pays, où résonnaient les chants de joie, était devenu une mare de sang. Le malentendu entre deux généraux nous entraînait en enfer.
dégel n'était qu'un faible écho.
La famine grandissait. D’ici septembre, disent-ils, 2.3 millions de personnes mourront de faim. Des chiffres, des chiffres, des chiffres ! Derrière eux, des gens qui avaient droit à la vie et qui en étaient privés.
Ma Nubie, comment en est-on arrivée là ?
Ma Nubie, mon amour, si je m'accroche c'est pour toi.
Alors j'ai écrit. J'ai écrit de manière robotique. J'ai partagé notre désespoir, notre terreur. L'écriture est une arme puissante contre les tyrans. Par mes mots, je les ai achevés avec des balles invisibles.
©Muhammad Mustafa Abu Al-Hassan. Un artiste de 23 ans vivant au Soudan.
Avec d'autres collègues journalistes, nous effectuons un travail de documentation et de dénonciation. Une guerre fait rage au Soudan, et même si le monde semble vouloir fermer les yeux, nous restons fermes. Il a fallu tenir, par l’écriture, pour se reconstruire.
C’était à la fois un acte thérapeutique et un acte de dénonciation. Le plus dur était le silence. La réduction au silence de nos souffrances. L'indifférence. Le manque de réaction. Comme si nos vies ne valaient rien. Je voulais crier au monde que nous existons et que nous souffrons de l'enfer. Je voulais crier et secouer le monde.
Des milliers de personnes meurent au Soudan et personne ne semble s'en soucier. Personne ne semblait s'en soucier.
Je voulais crier au monde que nous sommes humains. Que nous aimons la vie autant qu’eux. J'aimerais qu'ils sachent à quel point nous sommes résilients et qu'ils nous défendent. J'aimerais que le monde sache que nous comptons.
J'aimerais qu'ils soient enragés par ce que nous vivons.
La nuit, je me permets de rêver. Malgré l’obscurité de la nuit, les étoiles sont là pour nous rappeler l’espoir.
J'espère.
Je renoue avec ma Nubie.
Je lui fais des promesses.
Un jour, tout cela prendra fin.
Un jour, nous retournerons à nos anciennes vies.
La paix reviendra.
Un jour, le Soudan renaîtra, reconstruit.
Thawra !
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Réponses 8
Machallah, Mame Diarra
Alhamdulillah
C'est très intéressant
Merci
Veuillez également faire un don en euros.
Veuillez informer sur les alliances militaires existantes
Vous faites de nombreuses informations sur l'OTAN.
Et les autres?
Dans quelles relations restent-ils ?
Merci beaucoup!
Simone Agnès-Höhle
Teste
S'il vous plaît, faites une possibilité de don en euros.
Veuillez informer sur toutes les alliances militaires existantes.
Dans quelle relation sont-ils ?
Merci beaucoup.
Simone Agnès-Höhle
S’il vous plaît, négociez pour la paix de tous les côtés. Les humains constituent une seule espèce ; ne nous détruisons pas et ne nous exploitons pas les uns les autres. Appréciez notre différence, nos belles caractéristiques uniques qui ont mis des millions d’années à se développer. Plus d'ennemis, plus de destruction. Collaborez pour que tout le monde gagne, sans seigneurs, sans force, sans fraude, sans envie, sans mal.